Voyage au cœur des seigneuries médiévales autour de Seur
Le Moyen Âge dans la région de Seur, petit village lové entre Blois et les forêts de Sologne, c’est tout sauf un décor figé de châteaux isolés. C’est un jeu subtil entre des...
Au Moyen Âge, le territoire de Seur se composait d’une véritable mosaïque de seigneuries imbriquées. L’organisation féodale structurait la région, où chaque parcelle appartenait à un seigneur ou à une famille noble, souvent sous la suzeraineté d’un grand seigneur voisin comme ceux de Blois ou de Cheverny.
L’importance de ces seigneuries ne se limitait pas aux terres : elles organisaient aussi la vie judiciaire, la défense locale, percevaient la taille et administraient la justice seigneuriale. Les archives prouvent la tenue de plusieurs chartes, ventes de terres et actes de donation à l’église par les seigneurs de Seur du XIII au XVe siècle (cité dans La Sologne médiévale, Société archéologique de Loir-et-Cher).
Quels étaient les visages de ces seigneurs qui dirigeaient Seur au Moyen Âge ? Plusieurs familles se sont succédé, dont les patronymes figurent encore dans les archives et sur les vieux registres paroissiaux.
Le rôle de ces seigneurs n’était pas uniquement militaire. Ils géraient le moulin seigneurial, percevaient les corvées et taxaient le marché local. Anecdote : En 1378, une dispute entre le seigneur de Seur et celui de Chitenay sur des droits de pêche a donné lieu à une sentence arbitrale conservée aux archives locales – témoignage de la vie quotidienne et des rivalités entre fiefs (AD41, B 2099).
Le mythe templier plane sur les campagnes françaises, et Seur ne fait pas exception. À la lisière de son territoire, la Commanderie de Villechauve, fondée au XII siècle par les Templiers, gérait des terres, percevait des rentes et servait de relais sur la route de Saint-Jacques de Compostelle. Après la dissolution de l’ordre en 1312, les Hospitaliers reprirent les biens.
Des fouilles au XIX siècle ont mis au jour des vestiges de bâtiments fortifiés à Villechauve, attestant d’une présence matérielle forte des Templiers (Société archéologique du Loir-et-Cher, Bulletin 1872).
Si la société médiévale était structurée autour des seigneurs, elle vivait d’abord au rythme du travail paysan et artisanal. Entre le XI et le XVe siècle, Seur comptait entre 120 et 180 habitants (Évaluation par extrapolation des feux fiscaux, AD41, Censiers de 1412).
La dîme prélevée par le curé était souvent source de tensions, notamment lors de mauvaises récoltes : des rogations et processions spéciales étaient alors organisées, en quête d’une protection divine contre la grêle ou la sécheresse (mentionné dans le même registre).
Du règne de Philippe Auguste jusqu’aux derniers Valois, la région n’a pas été épargnée par les guerres. Le passage des bandes armées, surtout pendant la guerre de Cent Ans, a bouleversé la vie quotidienne.
Au quotidien, la crainte persistante des pillages ou de la réquisition de vivres obligeait les habitants à fortifier leur église et, selon les fouilles, à creuser des caves-refuges sous certaines maisons du vieux bourg.
Pour qui sait observer, Seur conserve encore des traces tangibles de son passé médiéval, bien que les reconstructions du XIX siècle aient masqué plusieurs vestiges anciens.
De nombreux toponymes (“La Motte”, “le Chemin du Moulin”) rappellent la présence médiévale des mottes castrales et des activités agricoles ancestrales.
L’importance religieuse du Seur médiéval se lit aussi bien dans les pierres de son église que dans le calendrier des habitants. Outre la dîme, la paroisse avait la charge de deux tertres-cimetières distincts (un pour le bourg, un pour le hameau de « La Boulassière », source : G. de Saint-Pierre, La vie paroissiale en Blésois au Moyen Âge).
Les liens avec les abbayes voisines (Pontlevoy, Bourgmoyen à Blois) sont attestés par des actes de partage de revenus et l’accueil de moines itinérants lors de certaines grandes fêtes religieuses.
L’évolution de Seur entre le XI et le XVe siècle témoigne de profondes mutations :
Le passage de l’époque féodale à la Renaissance modifie en profondeur le village : transformation du réseau de chemins, essor de la propriété privée, et montée en puissance de la bourgeoisie locale au détriment de l’ancienne noblesse villageoise.
Au détour d’un sentier ou d’une vieille pierre, le Moyen Âge reste présent à Seur : dans la déformation des rues, le clocher roman, les noms des lieux ou les traditions qui ont traversé les siècles. Ces vestiges, discrets mais persistants, invitent à porter un nouveau regard sur le paysage local, entre histoire et imaginaire : une invitation à explorer autrement le Loir-et-Cher, à la rencontre de ses racines médiévales et d’un patrimoine humble, mais ô combien attachant.
Sources principales : Archives départementales du Loir-et-Cher (fonds E, G et D), Bulletin de la Société archéologique de Loir-et-Cher, P. Héliot – Commanderies du grand prieuré d’Aquitaine, inventaires DRAC Centre, Françoise Michaud-Fréjaville, Jeanne d’Arc et la région de Blois.